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Cuckoo

3 janvier 2009

&a

 

Je ne vis plus qu'en marchant, il me semble que rien ne me retiendra jamais de partir. La route que je suis sent l'eau et le vent, elle n'a plus de fin. Et je vole au dessus de moi.


Certains endroits m'attirent, et malgré  le vertige, j'y cours comme quelqu'un qui fuit tout ce qu'il connaît. Je ne veux plus me voir, je ne veux plus me voir ici, avec ces mêmes regards tant essuyés, ses mouvements répétés, toutes ces choses que l'on fait sans y penser. Je veux me voir devant le précipice, dans la lumière éblouissante qui perce, devant une chose infiniment plus immense que moi, une chose non maîtrisable et qui m'envahit de sa force. Une atmosphère qui m'oblige à l'apprivoiser patiemment, avec un regard et des mots. J'ai besoin de voir ce que je ne connais pas, de donner la lumière à tout ce qui se présente à mes yeux. Je veux ce long silence qui me fait sentir que j'existe.


Au fond de mon ventre je sens le calme de vos cœurs qui battent, et bientôt je connaîtrai la forme humaine, pure et claire. Je ne sais pas ce qu'est la beauté, je l'ai trouvée partout où je l'ai cherchée, dans l'odeur du vent, d'un rire, au cœur de la nuit, dans chacun de vos pas, vos gestes, votre voix, la lumière sur votre voix, la lumière, la lumière...  Immobile au bord du monde je sens la chaleur m'envahir comme un feu, brûler mon crâne et mes mains, réchauffer la terre sous mes pieds. L'instant est court et infini, il me semble prendre racine au plus profond et m’étirer dans un espace qui s'étend. Intangible, inconcevable, et pourtant vibrant, fébrile. Je peine à exprimer ce que j'éprouve, ce silence ressemble à une prière, mais une prière qui ne demande rien, une prière qui tend ses mains et qui voit, une prière née de la nuit. Respirant patiemment, il me semble préparer quelque chose dans le creux de mon âme, quelque chose que je distingue encore à peine, une évidence pourtant, un sentiment si fort que j'ose à peine esquisser avec des mots. Parfois j'aimerais que vous sentiez. Parfois j'aimerais vous emportez en moi. Ou me donner à vous.


Je ne sais pas ce que c'est que peindre, je ne sais pas si la peinture s'apparente à l'émotion pure. Je pense qu'elle la dépasse, ailleurs. Peindre pousse hors de soi, peindre c'est marcher au bord de sa conscience, et pénétrer une pensée exaltée, qui ne se connaît pas elle même. Il y a quelque chose du déchirement et de la fusion dans la peinture, car elle implique au plus profond le corps avec l'esprit. Le corps qui lutte avec la matière, qui sent, la pensée qui se débat, qui transfigure, à la fois l'idée et la sensation. La peinture se vit absolument dans la pensée, et passionnément dans le corps, de cette même force qui pousse la sève dans l'arbre, et l'appelle à s'élever.


Ce moment fragile, là où la lumière naît et les choses s'éclairent, où l'esprit brûle d'exister et où l'acte se déploie de lui même, il faut le saisir tant que nous le pouvons, prêts à recevoir et à devenir, créer avec ferveur, et marcher avec le bruit sourd et puissant du silence, pour que jamais nous ne fatiguions de réinventer le monde.        

Libres de tout.

 

"J'ai toujours eu l'impression de vivre en haute mer, menacé, au coeur d'un bonheur royal"

Camus

 

main2

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